Après une année cauchemardesque pour la production attaquée par les jassides, des insectes ravageurs, les grands pays producteurs de coton ont pris les devants et espèrent tous une bien meilleure récolte.
Échaudée par les énormes pertes de production l’année dernière, la filière coton du continent a tout fait pour anticiper les attaques de jassides. Parmi les mesures qui ont été prises, il y a l’homologation de nouveaux insecticides, comme l’explique Jean-François Touré, président de l’association professionnelle des sociétés cotonnières de Côte d’Ivoire : « Dès qu’on a été informé de la situation, la recherche s’est mise en branle et a permis d’identifier des molécules de pesticides efficaces contre les jassides. Or ces molécules n’étaient pas homologuées dans la plupart des pays, notamment en Côte d’Ivoire. Le gouvernement a rapidement pris les mesures pour que l’homologation se fasse et les fournisseurs d’intrants ont également bataillé pour que les molécules soient disponibles pour la campagne de cette année ».
Le Tchad qui n’avait officiellement pas été touché l’année dernière par les jassides – mais avait perdu 33 000 hectares de coton à cause d’inondations – se montre cependant vigilant et a réagi dès que les premiers insectes ont été signalés il y a un mois et demi au Cameroun, de l’autre côté de la frontière, parce que « s’il y a des insectes au Cameroun, la logique veut qu’il y en ait au Tchad aussi », explique le secrétaire général de la CotonTchad. « Nous avons pris les devants en achetant des quantités conséquentes de produits, ce qui nous a permis de traiter rapidement dès que les insectes sont apparus vers Léré au Cameroun », explique Ibrahim Malloum qui espère que le coton du pays sera « sauvé » pour cette campagne.
Le Tchad espère produire 50 % de plus cette année, soit 150 000 tonnes, pour atteindre son objectif de 210 000 tonnes d’ici à deux ans. Plus ambitieux, le Mali qui avait perdu la moitié de sa production l’année dernière et chuté à la troisième place des producteurs du continent, espère récupérer sa position de leader du coton africain. « La campagne est prometteuse, nous comptons récupérer notre première place avec une production de 700 000 tonnes de coton graines », confie Boubacar Salia Daou, négociant en coton et président de Millenium Mali.
Des cotonculteurs qui restent trop frileux pour la nouvelle campagne
Partout où les produits étaient disponibles, les cotonculteurs ont traité, « parfois même beaucoup trop », assure un négociant basé en Côte d’Ivoire. Par peur d’une nouvelle année noire, certains ont cependant préféré passer leur tour et ont boudé le coton. Résultat, plusieurs pays n’ont pas atteint leurs objectifs d’ensemencement pour cette nouvelle campagne.
« Quand on sort d’une campagne difficile, la conséquence pour celle qui suit, c’est un rétrécissement des intentions de culture », explique Papa Fata Ndiaye, directeur général de la Sodefitex au Sénégal. « Au sortir de la dernière campagne, les producteurs étaient dans le doute et se demandaient si la solution préconisée par les sociétés cotonnières allaient être efficaces contre les jassides. Aujourd’hui, au vu de la façon dont s’annonce la nouvelle campagne, beaucoup regrettent de ne pas avoir fait de coton ».
Même s’il s’en est beaucoup mieux sorti que les autres l’année dernière, et a même gagné la place de premier producteur africain, le Bénin est, lui aussi, cette année confronté à une baisse des surfaces dans la région du Centre-Sud. « Le pays se donne deux ans pour retrouver sa production record de 765 000 tonnes, atteinte lors de la campagne 2021-2022 », assure un acteur de la filière.