Près de 200 producteurs laitiers de la région Vakinankaratra à Madagascar misent sur la coopérative locale Rova. L’organisation basée à Antsirabe sert d’intermédiaire entre les éleveurs de la région et les consommateurs, aux revendeurs jusqu’aux fabricants de yaourt. Un modèle porteur dans cette région des Hautes terres, première productrice de lait, où de nombreuses exploitations ont dû se relever des chocs économiques réguliers qui frappent la filière. Reportage dans l’une d’entre elle à Antsirabe.
Plus l’on s’enfonce dans le quartier d’Antsongo, en périphérie d’Antsirabe, plus les bruits de la ville disparaissent. Charles y gère une ferme avec ses parents. Il nous ouvre les portes de l’exploitation familiale : « Nous sommes parmi les éleveurs modèles dans la région, nous possédons cinq vaches à lait là-bas, cinq génisses, un taureau, un taurillon et trois veaux... En général, on trait la vache où elle se sent le plus à l’aise, dans une étable calme, non perturbée, pendant environ dix minutes, c’est l’idéal. »
Ces derniers mois, le prix des aliments de base pour les bêtes, la provende et le fourrage, a flambé. Conséquence, le litre de lait se vend 2 000 ariarys contre 1 800 en 2022. Malgré l’inflation, ces éleveurs s’estiment aujourd’hui relativement préservés des chocs réguliers qui touchent la filière lait. « La filière laitière rapporte beaucoup, affirme Rivoson le père de famille. La crise du lait, en partie due à l’insécurité, ne nous a pas vraiment touché. À la campagne, le pâturage n’est pas sécurisé. Par contre, notre ferme est clôturée, ce qui empêche les voleurs d’y entrer ! »
Un produit périssable qu’on ne peut pas stocker
Derrière cette confiance, se cache aussi un modèle économique porteur. La coopérative Rova installée à Antsirabé sert d’intermédiaire entre les petites exploitations laitières de la région Vakinakaratra et les clients. Ces éleveurs en sont membres nous explique Charles : « Selon notre accord avec Rova, notre lait tiré le matin sert à faire fonctionner la laiterie de cette coopérative. Pour le lait du soir, nous le vendons directement aux fabricants de yaourt et aux consommateurs de notre quartier, nous touchons immédiatement l’argent de cette vente, qui couvre les dépenses quotidiennes. »
Depuis la crise du lait en 2009, liée à l’effondrement de l’usine Tiko, la principale entreprise de collecte du lait, les éleveurs de la région ont dû faire preuve de résilience, rappelle Pascal, président de la coopérative Rova : « Dès lors qu’il y a une crise, les éleveurs sont les premières victimes des barrages économiques. Il y a eu les tensions en 2009, 2018, puis récemment en 2020 pendant le Covid. Le lait est un produit périssable, qu’on ne peut pas stocker comme les céréales. »
Rova plaide pour un appui plus important de l’État à la filière lait, stratégique pour la Grande Ile et la région Vakinankaratra. À elle seule, elle représente 80% de la production nationale.